Château de Boudry
Ambassade du vignoble neuchâtelois, œnothèque et musée
À propos du XXe siècle
Avant l’invasion phylloxérique qui ruina de nombreux vignobles en Europe, la superficie totale du vignoble neuchâtelois était de 1247 ha, soit environ 35450 ouvriers de 352m2. Le développement du phylloxéra, des nouvelles maladies cryptogamiques importées d’Amérique et, plus tard, les difficultés économiques provoquées par la guerre de 1914-18 (rareté de la main d’œuvre, etc.) sont les causes directes de cette diminution de l’aire viticole neuchâteloise à 840 ha en 1945.
À cette époque, les vignes de rouge ont diminué en proportion davantage que le blanc en raison du rendement moins élevé et moins régulier du Pinot noir.
Le vignoble neuchâtelois est complanté exclusivement en Chasselas pour le blanc (soit le Fendant roux et le Fendant vert) et en Pinot noir de Bourgogne pour le rouge. Les producteurs-directs sont interdits, ainsi que diverses variétés de plants de blanc à forte production mais de qualité inférieure qui ont été éliminés des vignes par les nouvelles dispositions légales issues de la reconstitution obligatoire du vignoble.
Ceci explique en partie la franchise de caractère des vins de Neuchâtel, blancs et rouges. Elle est due aussi à l’homogénéité du vignoble, limité à une région au climat égal et aux terres de composition assez uniforme.
Ce qui cause le caractère des vins de Neuchâtel, ce sont premièrement ses terres jurassiques dont se compose le sol du vignoble. L’on sait que le calcaire est nécessaire à la formation du bouquet des vins. On trouve là beaucoup d’analogie avec la Bourgogne. C’est deuxièmement son climat tempéré par le réservoir de calories que constitue le lac et troisièmement, son genre de vinification pour le blanc.
Les vins blancs restent sur leurs lies : « Vins sur lies », sans être transvasés comme cela se pratique dans la vinification française. De ce fait, le vin reste riche en gaz carbonique, il est pétillant et développe largement son bouquet ; c’est le premier plaisir de l’odorat. Il s’étend ensuite sur la langue et y fait valoir toutes ces qualités de vin de race.
Suivant l’état de clarification naturelle du vin dans les tonneaux, on peut le soutirer en bouteilles sans le filtrer. Il gardera alors plus de finesse et de caractère. Mais seuls quelques petits encaveurs pratiquent cette méthode qui offre certains risques. Il peut se former dans la bouteille un léger dépôt sous forme d’une « mouche », petite masse ovale de très fine lie sur le côté inférieur de la bouteille prise au casier, ou encore une très légère « fougère », soit un dépôt ténu en forme de feuille de fougère ramifiée, sur le côté inférieur de la bouteille également. En soi-même, ceci n’est pas un défaut, au contraire, le vin aura travaillé en bouteille et gagné en finesse. Malheureusement, dans le commerce, cette particularité est mal vue, voire inadmissible, on demande des vins limpides. Le Neuchâtelois avisé qui encave sa propre récolte, gardera pour lui-même les bouteilles qui font la mouche, il sait que ce sont les meilleures.
Mais dans la règle générale, tous les vins sont filtrés à la mise en bouteille.
1937 : fondation de l’Association des encaveurs neuchâtelois.
Les associés se soumettent volontairement à un contrôle de production quantitative, à un contrôle de cave et qualité des vins par analyses et dégustations, et à un contrôle comptable. La marque de garantie délivrée est le cachet figurant la « gerle neuchâteloise » collé sur chaque bouteille scellée d’un bouchon portant la marque de l’association.
Comme le statut fédéral du vin met beaucoup de temps pour entrer en vigueur, Neuchâtel prend les devants et institue dès 1942 le contrôle de la vendange par l’achat au degré, d’abord facultatif en 1942, puis rendu obligatoire par le Conseil d’Etat dès 1943 et étendu à toute la production dès 1944. Le statut du vin entre vigueur en 1945 ; la production et l’encavage seront dorénavant contrôlés. Entre temps, par les services du laboratoire cantonal, des prélèvements des moûts de toutes le récoltes ont été faits depuis de nombreuses années, vérifiant ainsi la teneur moyenne en sucre du moût de chaque année, de même que des prélèvements d’échantillons de vin permettant d’en vérifier l’authenticité et la tenue.
(octobre 1945)