Château de Boudry

Ambassade du vignoble neuchâtelois, œnothèque et musée

Caves de La Béroche

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(Jusqu’en 1935, année de fondation des Caves de la Béroche, la vendange produite sur le territoire de la Béroche se vendait toujours à un cours inférieur de 5%, voire moins, par rapport au cours pratiqué dans le reste du vignoble.

Le vigneron, qui avait travaillé durant toute une année et qui au prix de grands sacrifices avait mené à bien sa récolte, n’était pas encore au bout de ses peines: il devait encore trouver un acheteur!

Celui-ci ne se présentait qu’à la veille des vendanges et, chose étonnante, achetait sans fixer de prix. Ce dernier n’était fixé que plus tard lorsque la récolte était déjà dans les vases de l’acheteur.

Jusqu’en 1935, année de fondation de l’Association des Caves de la Béroche, le prix payé pour la vendange de la Béroche était toujours inférieur de 5 à 10 francs aux prix pratiqués dans le reste du canton et même à ces prix-là, il n’était pas toujours facile de trouver preneur.

Cette situation était la conséquence du manque d’encavages dans cette région et les grands propriétaires du lieu (les familles Langer, Wesdehlen, Rougemont, Borel), qui possédaient des caves suffisantes, n’y encavaient que le vin de leur cru. Les petits et moyens propriétaires qui ne disposaient d’aucune installation d’encavage, étaient à la merci du commerce.

Pourtant la vendange produite à la Béroche en valait bien une autre et les prix bas offerts par les négociant n’étaient nullement justifiés.

C’est pour remédier à cette anomalie et dans l’espoir de recevoir une plus juste rémunération de leur travail que les viticulteurs de la Béroche se sont attachés à cette idée d’encavage en commun.

En 1906, grâce à l’initiative de MM. Emile Matthey et Gustave Hermann, un premier essai de création d’une cave coopérative fut tenté. Le moment était bien choisi: 1906 était une année remarquable tant pour la qualité que pour la quantité. Cependant, les propriétaires se montrèrent indifférents puisque seuls sept d’entre eux répondirent à l’appel. S’ils étaient bien disposés à l’idée de créer une cave coopérative, ils voulaient toutefois ses réserver les raisins de leurs meilleurs parchets, montrant par-là les limites même de leur esprit de coopération.

Après cet échec, il fallut attendre 1932 pour que l’idée soit reprise mais rien de concret ne fut réalisé. L’année suivante, une nouvelle assemblée adopta le principe d’une cave et le 1er décembre 1933 fut constituée une commission d’étude qui travailla avec ardeur pour définir les plans de construction d’une cave moderne. Après de nombreuses visites dans différents cantons, des relations avec des architectes et des techniciens, cette commission présenta le 22 mars 1934 un rapport documenté pour la construction d’une cave permettant de vinifier et de loger quatre cent mille litres de vins pour une participation de 1000 ouvriers au moins, recommandant de ne rien entreprendre si ce chiffre ne pouvait être atteint. Comme ce jour-là, les adhésions se montaient à 583 ouvriers pour 33 sociétaires, le projet dut être abandonné.

Malgré tout, l’idée avait fait son chemin. Des 7 de 1906, les propriétaires étaient 33 en 1934 et à la demande d’une majorité d’entre eux, la commission continua ses travaux. Le 11 avril 1935, un nouveau rapport fut présenté. Celui-ci prévoyait d’utiliser les caves existantes dans les villages. Il convenait de louer trois caves: celles des Langer de Wesdehlen à Saint-Aubin et celle du château de Vaumarcus.
Si cette solution présentait l’inconvénient de caves dispersées dans le pays, elle était en revanche nettement moins onéreuse.
Mais l’outillage de ces caves étaient loin de correspondre aux besoins de l’encavage. Tant pour les pressoirs que pour les vases.

Au cours de cette même assemblée, un projet financier et les statuts de la future société furent présentés et discutés.

Finalement, c’est le 4 mai 1935 que l’Association vit officiellement le jour. Elle regroupait quarante sociétaires avec 549 ouvriers de vignes. Dans les jours qui suivirent, quinze nouveaux sociétaires rejoignirent la Société pour une superficie de 818 ouvriers. Dix ans plus tard, elle comptait 91 sociétaires pour 1038 ouvriers de vigne, soit l’équivalent de 36 hectares et demi.

D’emblée, le comité élu dut s’attacher à préparer la vendange 1935. Avant tout, il fallait trouver de l’argent. Diverses démarches furent tentées, sans succès, tant auprès des banques qu’auprès des autorités cantonales et fédérales. C’est alors qu’il s’adressa à la population de la Béroche. Un emprunt obligataire à 4% fut émis et, très rapidement,, grâce à la compréhension et à la sympathie des habitants de la Béroche et de quelques personnes habitant au dehors , le comité disposa d’un somme qui, ajoutée aux parts sociales, lui permit de faire l’acquisition du matériel indispensable à la bonne marche de l’entreprise.

Un pressoir hydraulique Rauschenbach avec quatre maies roulantes d’une contenance de 1250 litres chacune, une émietteuse, dix vases neufs de la tonnellerie de Rheinfelden, seize d’occasion furent acquis. De plus, trois cuves verrées Borsari d’une contenance totale de 48000 litres furent construites dans la cave Langer. Le tout fut livré à la dernière minute et ce n’est pas sans appréhension que le comité vit arriver l’heure de la première récolte.

Finalement tout se passa au mieux et 2307 gerles de blanc et 155 de rouge furent encavées.

En 1936, le travail des pressoirs fut amélioré avec la construction de trois cuves d’égouttage et quatre mille litres chacune, ce qui permit de pressurer en six jours seulement, dans une seule cave, 1832 gerles de blancs alors qu’en 1935, tous les pressoirs avaient été utilisés, soit les deux de Vaumarcus, les deux de la cave de Wesdehlen et les trois de la cave Langer.

En 1935, après avoir logé le moût, il restait à trouver les sommes nécessaires au paiement de la vendange des sociétaires.

Ayant pu vendre une quantité importante en moût, le comité put facilement réunir l’argent nécessaire au premier versement de Noël. Pour le deuxième versement, ceci fut moins aisé. C’est grâce à un prêt à 2 % de la Fédération romande des vignerons que les sociétaires purent recevoir leur deuxième acompte.

Pour écouler les vins 1935, le comité avait tout d’abord pensé à des enchères publiques. Comme un négociant du canton lui avait acheté une bonne partie de la production dès le début de janvier, il renonça à ce projet. Le solde fut écoulé par la suite normalement, si bien qu’à fin d’exercice, en septembre, les réserves étaient justes suffisantes pour faire la soudure avec le 1936.

Pour le millésime 1936, le comité n’arriva pas à s’entendre avec leur gros client, si bien qu’une mise aux enchères eut lieu le 16 mars 1937. Les amateurs vinrent en nombre mais peu nombreux furent les clients effectifs même si une bonne moitié du stock trouva preneur. Toutefois, ceux qui en avaient acheté revinrent en rechercher par la suite, se déclarant satisfaits du produit.

Ainsi, très rapidement, la Cave de la Béroche put s’attacher une clientèle et trouver une assise financière à la satisfaction de ses sociétaires.