Le musée de la vigne et du vin

Château de Boudry Ambassade du vignoble neuchâtelois, œnothèque et musée

La réouverture

14 octobre 1989

Samedi 14 octobre à 16 heures, de nombreux invités se rassemblaient devant la porte du château, attendant impatiemment le début de la cérémonie. Les Vignolants en grande tenue s’étaient groupés autour de Maurice Frainier, le Gouverneur en charge. Sur le coup de 16h15, au son des trompettes, l’assemblée entra dans la salle des Chevaliers. Hérault du jour, le Gouverneur salua les nombreuses personnalités qui se trouvaient dans la salle, Pierre Aubert, ancien président de la Confédération, Jacqueline Bauermeister, présidente du Grand Conseil, Francis Matthey et Jean-Claude Jaggi, conseillers d’État, André Brandt, ancien conseiller d’État, les autorités politiques communales, les conservateurs de musée, les représentants de la presse et tous ceux qui, à un titre ou à un autre, manifestaient de l’intérêt par leur présence.

Les Vignolants présents en grande tenue, le Musée de la vigne et du vin est réouvert

Maurice Frainier céda ensuite la parole à Francis Matthey qui, au nom de l’État, propriétaire des lieux, dressa un historique des transformations et rénovations que le châ­teau a subies au cours de ces trente derniè­res années, entreprises grâce à la volonté tant de Pierre-Auguste Leuba que d’André Brandt, qui, tous deux, chef du Départe­ment comprenant l’Intendance des bâti­ments, ont pris sur eux de restaurer ce véné­rable château.

Francis Matthey a tenu aussi à rappeler que ce musée vient honorer la qualité du travail des hommes de ce pays pour l’amour de leur terre; que ce musée se devait d’être le trait d’union entre le passé et l’avenir, le rappel incessant de la peine et du sang des vignerons qui, malgré la méca­nisation, portent toujours le même regard vers le soleil et la même main vers la terre.

Vivre et fructifier

Francis Matthey remit ensuite le musée à Pierre Duckert, président de la Société du Musée de la vigne et du vin, en émettant le vœu suivant : « Qu’à l’image de la vigne qui est un organisme vivant, le musée soit une institution qui vive et qui fructifie ». Pre­nant à son tour la parole, Pierre Duckert a brièvement retracé l’historique du musée, évoquant sa naissance en 1951 grâce à la Compagnie des Vignolants qui voyait alors le jour sous l’impulsion de Jean-Pierre Baillod, sa première ouverture au public en 1957 qui faisait que ce musée était le premier du genre à exister en Suisse; qu’en 1978, un groupe de travail fut constitué sous l’égide d’André Brandt pour se pen­cher sur une image touristique à donner au canton; qu’en 1981, à la suite de cette réflexion, la Société du Musée de la vigne et du vin fut fondée grâce au dynamisme d’Alex Billeter; que deux salles réaména­gées furent présentées au public en 1986 et qu’enfin, le jour tant attendu était arrivé.

Gels déterminants

Henri-Louis Burgat, président de la Fédéra­tion neuchâteloise des vignerons, parla en toute simplicité de la vigne, distinguant les grands changements apportés dans la cul­ture après les gels des années 1956 et 1963, eu égard à la mécanisation et au remanie­ment parcellaire qui fut alors possible. Et, finalement, c’est votre serviteur qui put témoigner publiquement sa gratitude à tou­tes les personnes qui ont permis que ce rêve concocté dès 1981 puisse se voir réaliser. Sans l’État, sans une volonté politique, sans le dynamisme extraordinaire de l’Intendant des bâtiments de l’État, Philippe Donner, sans la pondération de son adjoint René Schmidt, sans le coup de patte de l’archi­tecte, Jean-Louis Béguin, sans l’exubérance du décorateur Abel Rejchland, sans l’appui inconditionnel des communes viticoles et de tous les membres de la Société du musée de la vigne et du vin, sans la confiance de son comité, sans la patience de M. et Mme Châtelain, les hôtes de Boudry, sans l’aide de tous ceux que je voudrais encore citer et qui, de près comme de loin, ont aidé et par­ticipé à cette aventure, le Musée serait encore une utopie.

Belle réalité

Le rêve est donc devenu réalité et les visi­teurs du musée peuvent enfin découvrir ce qui dormait depuis des années au plus pro­fond des greniers et des caves, objets témoins d’une viticulture neuchâteloise bi­millénaire, principale ressource économi­que du pays pendant des siècles. Et toutes ces pièces sont présentées dans un cadre résolument contemporain qui marque notre époque au cœur d’un monument médiéval. Le lien est ainsi fait, ce qui montre que la vigne reléguée au musée est en relation directe avec celle qui est cultivée aux alentours du château. Le musée est donc le trait d’union entre hier et aujourd’hui. Grâce aux expositions temporaires, il pourra encore affiner des domaines où la spécifi­cité neuchâteloise est à démontrer.

2500 ans

Après cette partie consacrée aux discours, le ruban aux couleurs neuchâteloises fut solennellement coupé à l’unisson à l’aide d’une cisaille vigneronne sortie des profon­deurs d’une hotte par Francis Matthey et André Brandt qui, précédemment, avait été nommé membre d’honneur de la Société.

Enfin, tous allaient pouvoir accéder aux nouvelles salles pour passer en revue tout d’abord une collection d’objets qui permet­tent de survoler 2500 ans de l’histoire du contenant, de découvrir ensuite une vision du vignoble neuchâtelois vers 1800 avant d’emprunter l’escalier qui donne accès à la partie ethnographique du musée. Là, le cycle des saisons de la vigne, présenté tout d’abord sous forme d’un diaporama pour sa phase moderne, est figuré par six alvéo­les où le visiteur peut suivre les travaux de l’hiver, la taille, les labours, les traitements, le greffage puis finalement la vendange. Des ouvertures ad hoc faites dans le toit laissent plonger le regard sur les parchets environnants. En continuant son parcours, le visiteur monte dans la salle des exposi­tions temporaires où actuellement, il peut découvrir un survol de l’histoire de l’étiquette neuchâteloise sur plus de 150 ans.

Au pressoir

Dès que tous eurent pu admirer l’ensemble, l’officialité reprit son droit. Le pressoir du XVIIIe du musée attendait ses pressureurs pour que le moût puisse couler. Francis Matthey et André Brandt surent à merveille pousser la palanche afin que toute l’assem­blée déguste le nectar fraîchement pressé. Un vin d’honneur clôtura ce jour fameux !

Depuis, le musée est opérationnel, fonc­tionnel et attend du jeudi au dimanche de 14 heures à 17 heures tant les amoureux de la vigne et du vin que tous ceux pour qui l’Histoire compte.

Patrice Allanfranchini