Le musée de la vigne et du vin

Château de Boudry Ambassade du vignoble neuchâtelois, œnothèque et musée

La dernière gerle

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Les traditions folkloriques anciennes sont rares dans le pays de Neuchâtel. La plupart du temps, elles ont simplement disparu ou subsisté sous des formes entièrement renouvelées, sans aucun rapport avec leur symbolique première.

Si tous les Neuchâtelois connaissent la Fête des vendanges, son cortège et ses mœurs bachiques, presque tous ont oublié la tradition de la dernière gerle. Une fois la récolte achevée, tous les vendangeurs se réunissaient autour du dernier char à brecets et accompagnaient le charroi jusqu’au pressoir en une farandole bruyante et spontanée.

Cette pratique fort représentée dans les vignobles de France possédait ses variantes propres à chaque province. Claude Royer dans son ouvrage « Les vignerons: usages et mentalités des pays de vignobles» Paris, 1980, dit: «En Alsace, le cortège est animé par les facéties du Herbstschmuerel, personnage traditionnel au visage barbouillé de noir. Ailleurs un plaisantin, s’il s’en trouve, amuse par ses pitreries les membres du cortège et les spectateurs. Le cortège du dernier char de vendange était général en France jusqu’en 1914. Mais la décoration de ce char n’est attestée que dans quelques vignobles.»

L’œuvre reproduite ci-contre est due au peintre Alfred Dumont né en 1828 et mort à Genève en 1894. Après avoir suivi des cours de droit à l’Université de Genève, il commença sa carrière artistique auprès de J.-L. Lugardon. Il séjourna ensuite à Düsseldorf où il retrouva son compatriote Benjamin Vauthier, avec lequel il entretint des relations suivies. Il poursuivit ses études à Paris dans l’atelier de Gleyre et se perfectionna en voyageant tant en Autriche, en Allemagne qu’en Italie. Il se fixa ensuite à Genève.

Le Dictionnaire des artistes suisses dit à son sujet: «C’est dans ses études, plus que dans ses tableaux, qu’il faut étudier cet artiste, qui était un sensitif et saisissait avec sincérité les lignes d’un paysage ou les traits d’une figure; il n’aimait guère le travail d’atelier, redoutant de reprendre une toile, de la corriger. L’impression première était chez lui plus vive que persistante, aussi on peut dire qu’il n’a pas donné, en tant que peintre, toute sa mesure. On devra faire cas de ses innombrables croquis, vifs spirituels, —I’esprit était une de ses qualités, un esprit non exempt de causticité parfois, – bien observés… »

Ces remarques semblent totalement pertinentes si nous observons attentivement l’œuvre qui nous intéresse. Suivant le char à brecets où se reposent un vieux vendangeur bourrant sa pipe, une mère et son enfant ainsi qu’un autre vigneron, attentif à l’équilibre du tonneau millésimé 1884 sur lequel, tel un Bacchus, un jeune garçon trône une coupe à la main, le cortège des vendangeurs danse au son d’un bandonéon. Le brandard marque le rythme avec son pilon, arborant fièrement une belle grappe de raisin, symbole d’une récolte bienvenue. Les vendangeuses sautillent d’allégresse, leur seillon sous le bras. Un jeune homme, hardi, profite d’embrasser tendrement une belle. Un autre brandit une longue perche décorée d’une couronne de pampre. Les enfants accompagnent le cortège.

Le propriétaire

En redingote, le propriétaire, un Montmollin sans aucun doute, récompense ses jeunes aides. Il doit être satisfait puisque toutes les vignes ont été vendangées et que la récolte pourra être encavée. Le cycle de l’année vigneronne peut donc s’achever dans l’allégresse.

Un vibrant appel à un sponsor

Ce document découvert il y a quelques temps chez un antiquaire est à vendre et même si son prix est relativement modeste, il ne peut être acquis sans problème par le Musée de la Vigne et du Vin, lieu où, semble-t-il, il devrait pouvoir être exposé.

C’est pourquoi, le conservateur signataire lance un appel à la générosité d’un éventuel sponsor pour que cette pièce d’un intérêt documentaire considérable pour la connaissance de l’histoire des mentalités et traditions neuchâteloises puisse faire partie d’une collection publique.

En espérant que son appel soit entendu, le conservateur remercie d’avance celui ou ceux qui prendront contact avec lui pour résoudre cette affaire.