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La Fête des Vendanges au XXIe siècle
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Si en 2000, la Fête des Vendanges a célébré le 75e anniversaire de sa structure moderne, soit celle née en 1925 après le couac de 1924 – année où il n’eut point de cortège faute d’organisateurs mais une foule nombreuse venue principalement de Suisse allemande attendre en vain un événement qui n’eut point lieu – en abordant le nouveau millénaire, elle se doit d’exister en associant intiment le respect d’une tradition séculaire avec le piment de l’innovation.
Au cours de son histoire, la Fête des Vendanges a connu des hauts et des bas. Trop souvent, ses organisateurs ont vu dans les aléas météorologiques les uniques causes de ses insuccès. Il est toujours facile d’attribuer la faute au temps, à la pluie.
Sans aucun doute, les caprices du soleil influent sur les affluences, surtout au moment du cortège toujours voulu comme le point d’orgue de la Fête. Cependant, l’analyse statistique de la fréquentation du cortège montre bien que le public a commencé à s’en désintéresser à partir des années septante. En l’espace d’un lustre, le nombre des spectateurs a diminué de moitié. De quatre-vingt mille, on passa aux alentours des quarante mille. Avec le temps même, ces chiffres diminuèrent encore pour stagner, bon an, mal an, autour de vingt mille.
Ce n’est que l’année passée que la fréquentation s’est à nouveau accrue, réjouissant sans aucun doute tous les organisateurs.
S’interroger sur le désintérêt du public est donc une nécessité au moment où les gay-pride et les cortèges techno voient déferler des foules immenses. Sans conteste, la Fête des Vendanges n’a aucun lien direct avec ces manifestations si ce n’est qu’elle tente, comme elles, d’attirer le plus de monde possible.
Il faut donc admettre que le cortège tel qu’il est aujourd’hui ne correspond plus au goût du grand nombre.
Là se pose un problème fondamental : quel public cible la Fête doit-elle rechercher ? Par rapport à celui qui y accourt en masse les vendredi et samedi soirs, qui est encore là le dimanche ?
Il est certain que le type de spectacle proposé aujourd’hui au cortège est quelque peu suranné. Il y manque sans aucun doute une présence massive de la jeunesse. L’aspect humoristique et irrévérencieux n’y a plus place. La satire y a disparu.
Pour qu’un esprit caustique puisse à nouveau s’y développer, il devient indispensable de permettre à de jeunes graphistes, de jeunes artistes, de jeunes musiciens de s’insérer dans le programme. En y entrant, ils entraîneront avec eux toute une mouvance dont on ne mesure pas l’importance.
La Fête s’est aujourd’hui figée dans un moule qui lui est propre mais ce moule-là correspond à une époque qui tend à disparaître. Ceux qui l’ont mis en place l’ont fait avec passion mais il est temps de permettre à d’autres de s’exprimer.
La Fête doit donc sortir de son carcan. Elle doit se relooker pour utiliser une expression actuelle. Ce relookage doit associer à la fois la tradition mais aussi l’innovation.
Remettre à jour un concours d’idée pour la réalisation d’une affiche comme cela existait autrefois, offrir à des publicistes la possibilité de définir de nouveaux slogans, inciter des classes ou des jeunes à réfléchir sur la Fête, bref mettre en place un marketing agressif dans le bon sens du terme me semble aujourd’hui obligatoire.
Et au-delà de cette insertion dans notre temps, il faut aussi sans cesse rappeler le sens même de cette Fête, afin de supprimer les ambiguïtés qu’elle suscite. A cet égard, il convient aussi de travailler pour que l’ancrage historique ne soit pas vain.
Un cortège nouveau dans un nouveau parcours.
La Fête de 2001 va répéter une nouvelle fois une recette éprouvée. En revanche avec 2002 et l’Exposition nationale, il faudra faire preuve d’imagination. On pourrait par exemple construire un cortège qui s’étirerait entre la place Purry et Serrières, le long des quais et qui tournerait en boucle. Les spectateurs pourraient avoir un spectacle total, animé sans cesse dans les deux sens. Les fanfares passeraient de site en site où elles pourraient alors faire des exhibitions. Les chars ne seraient pas limités en hauteur. En stationnant quelque temps à des endroits précisés, ils laisseraient le temps à des présentations de toutes sortes. Bref, on n’aurait plus sous les yeux un défilé constant mais une succession de scènes animées, définies par un thème commun, rendant dès lors le tout cohérent.
Ceci exigerait sans aucun doute une mise en scène ou en tout cas une scénographie commune. Il conviendrait aussi de construire sur les voies du tram des gradins. L’aménagement serait complètement nouveau…
Utopie…
Non. C’est simplement le moment de tout repenser et de reconstruire en se plongeant dans l’innovation. Les leçons du passé nous ont montré aujourd’hui les limites de la Fête actuelle. Sachons garder l’esprit de la Fête, soit la célébration des Vendanges, mais osons désormais un renouveau complet en faisant confiance à des forces jeunes et novatrices.
Patrice Allanfranchini