Le musée de la vigne et du vin
Château de Boudry Ambassade du vignoble neuchâtelois, œnothèque et musée
Quelques mots à propos d’un règlement pour les vignerons
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La Compagnie des vignerons de Neuchâtel fondée en 1687 avait pour but l’amélioration du vignoble neuchâtelois. À cette époque, l’aspect des vignes était souvent pitoyable. Leur culture était négligée, cela étant dû fréquemment à l’incapacité des vignerons chargés de les entretenir.
Pour faire face à cette situation, les propriétaires de vignes de Neuchâtel se sont groupés en une corporation afin de redonner au vignoble un aspect présentable et pour remettre en valeur les parchets délaissés. À cet égard, ils ont promulgué un règlement à l’usage des vignerons qu’ils employaient afin que chacun puisse connaître les usages et pratiques demandés par la culture de la vigne.
Voici en entier le texte de ce règlement dans sa version imprimée du XVIIIe siècle. Un exemplaire de ce texte sera prochainement visible au musée de la Vigne et du Vin à Boudry.
Règlement pour les vignerons
Tous les vignerons qui cultivent les vignes de la Brévarderie, domiciliés, soit au dedans, soit en-dehors de la ville, seront obligés de se soumettre aux statuts & à la police de la compagnie, & de faire la promesse suivante:
- Vous promettez de donner aux vignes que vous cultiverez toutes les saisons convenables, savoir:
- De les tailler sans les trop charger, en observant de les charger davantage au bas des vignes qu’au haut.
- D’attacher les treilles.
- D’essarmenter exactement, mettant dans les faisceaux de sarmens les seps morts & arrachés dans l’année précédente.
- De fossoyer du croc, ou hoyau, ayant soin de nettoyer le pied des seps & d’en ôter exactement la mousse & le chevelu, de bien les redresser & de planter des échalas aux jeunes seps.
- De provigner sans mettre les seps trop près les uns des autres; de ne faire aucune fosse à quatre provins d ‘un seul sep; de donner à vos fosses une profondeur convenable suivant la nature du terrein, & de ne provigner aucun jeune sep sans une grande nécessité.
- D’échalasser en redressant les seps, & en employant aux provins les échalas qui auront encore deux pieds & demi de longeur.
- De donner le second labour avec le bident ou fossoir à bec. D’ébourgeonner avec précaution.
- De relever en liant premièrement les bois courts & ensuite les longs, & en observant soigneusement de ne pas lier les grappes & les feuilles, & de ne pas trop serrer les ligatures.
- De donner le troisième & dernier labour.
- De tirer après les vendanges les échalas des vieux seps, & de les entasser sur des soutiens.
- D’être en toutes saisons avec vos ouvriers, & de n’en employer aucun qui ne soit entendu & propre aux divers ouvrages.
- De n’emporter des vignes, ne seps, ni échalas, ni sarmens.
- De répandre, soit dans les fosses, soit sur la vigne, tel engrais qui vous sera fourni, sans exiger pour cela aucun salaire, à moins que cet engrais n’excédât demi-char par homme de vigne.
- De ne pas permettre aux femmes de coucher les seps dans les fosses, sans une permission des visiteurs.
- De ne commencer aucun labour ni saison de la vigne, que par la permission des visiteurs.
- De ne point aller à la vigne aussi longtemps que la banderolle sera exposée à la Croix-du- Marché.
- Vous ne permettrez pas qu’il soit fait aucun dommage aux vignes de vos maîtres; & si vous vous apperceviez qu’un voisin anticipât, tirât la terre sur sa vigne, prît des échalas, ou causât quelqu’autre préjudice que ce soit, vous en avertirez incessamment vos maîtres.
- Vous ne couperez ni n’arracherez aucun sep, à moins qu’il ne soit mort, & même alors vous attendrez pour cela l’année suivante; vous ne sortirez aucune poudre, ni greffe, ni ente, que par la permission expresse & par écrit du propriétaire de la vigne.
- Les fosses d’un seul provin vous sont défendues, & elles ne vous seront point payées. Si le nombre de celles à deux provins excède le quart du total des fosses, elles ne vous seront pas payées non plus. Celles à trois provins vous seront payées pour une. Celles de quatre, cinq & six provins seront payées pour deux fosses; celles de sept & huit provins, pour trois fosses; & celles de neuf & dix provins, pour quatre; bien entendu que vous ne leverez jamais quatre provins d’un seul bois; car, en tel cas, vous serez amendable de vingt batz pour chaque fosse. Vous ne ferez que trente à trente-cinq fosses par chaque homme de vigne, à moins que vous n ‘en ayez un ordre exprès de votre maître. Vous amasserez la terre aux deux côtés & au-dessus de la fosse, & jamais audessous. Enfin, vous ne coucherez aucun doublet ou logneux, à moins qu’il n’ait deux bois propres à former deux provins, ou qu’il ne puisse s’associer dans une même fosse avec un autre sep.
En cinq points
Quelques commentaires s’imposent.
- Par brévarderie, il faut entendre le territoire sur lequel s’exerçait le droit de police de la Ville et qui jouissait d’un privilège viticole en ce qui concernait le droit de ban des vendanges.
- Le début des saisons à donner à la vigne était annoncé scrupuleusement par les sauthiers de la Ville afin que tous les vignerons fassent ensemble les travaux nécessaires. Cette rigueur dans le travail était due aux possibilités de visite pratiquées par les délégués de la Compagnie afin de vérifier si le travail était correctement effectué.
- C’est la technique du provignage ou marcottage qui était utilisée pour le renouvellement constant des parchets. Le vigneron creusait une «fosse» dans laquelle il couchait un cep déchaussé qu’il recouvrait ensuite de terre en laissant sortir de terre quelques sarments qui prenaient peu à peu racines.
- Il est amusant de relever que les femmes n’avaient pas le droit de provigner sauf autorisation expresse des représentants de la Compagnie.
- Les calculs concernant les salaires octroyés aux vignerons étaient fonction du travail effectué dans chaque parchet.